Rencontre avec le commissaire Justine, affectée au commandement de l’espace.

Le commissaire Justine, affectée au commandement de l’espace.

Justine est commissaire des armées, affectée au sein de l’armée de l’Air et de l’Espace. Elle exerce en tant que legal advisor, conseiller juridique.

Afin de répondre aux questions que vous vous posez sur le droit international, le droit spatial, et l’armée, le commissaire Justine présente son parcours et ses activités.

Pourriez-vous nous dire comment vous avez découvert l’armée ?

On peut dire que je suis « née dans l’armée » puisque mes deux parents sont militaires, ainsi que l’étaient mes deux grands-pères. 

Pourriez-vous nous indiquer quelles études vous avez suivies ?

J’ai fait mes études de droit à l’université de Bordeaux. J’ai tout d’abord effectué une licence de droit privé avant de m’orienter vers un Master 1 en droit international. Puis, j’ai choisi de me spécialiser et j’ai réalisé un Master 2 en droit et management du transport aérien à Aix en Provence. En parallèle de mon Master 2, j’ai passé un diplôme d’études supérieures universitaires (DESU) en assurances aériennes et spatiales. Fort de mes cours en droit international humanitaire, droit aérien et droit spatial, j’ai eu l’opportunité d’être recrutée sous contrat au sein des armées pour un premier contrat d’un an, rapidement transformé en CDD de 4 ans, que je viens d’ailleurs de prolonger pour 4 années supplémentaires.

Dans ce cadre-là, j’ai reçu une formation militaire de plusieurs mois à l’école des commissaires des armées.

Avez-vous rencontré des difficultés ?

Mes deux parents ont un certain niveau d’études puisque tous deux ingénieurs diplômés de l’Ecole de l’air et de l’espace. Je ne me sentais personnellement pas faites pour les classes préparatoires mais, j’ai trouvé un domaine dans lequel je me plais à apprendre et exercer : le droit. J’ai ainsi compris qu’il ne sert à rien de se comparer, car chacun de nous a des compétences et un domaine dans lequel il peut réussir. Après des premières années assez générales, c’est au fil de la spécialisation que j’ai découvert des matières qui m’ont réellement intéressées et données envie, notamment le droit international humanitaire, le droit maritime ou encore le droit aérien.

Comment avez-vous intégré l’armée ?

Il existe plusieurs façons d’intégrer l’armée.

Il est possible de passer un concours et ainsi d’être ce qu’on appelle de carrière ou d’être embauché sous contrat à durée déterminée pouvant cependant aller jusqu’à la durée d’une carrière entière si nous renouvelons plusieurs fois le contrat. Pour ma part, j’ai intégré l’armée via ce que l’on appelle les officiers sous contrat (OSC). Il s’agit d’un contrat à durée déterminée de quatre ans et renouvelable plusieurs fois en fonction du besoin des armées.

Y a-t-il des différences entre les militaires sous contrat et les militaires de carrière qui ont passé un concours ?

Concrètement, que l’on soit sous contrat ou que l’on ait passé un concours, on peut exercer les mêmes fonctions.

Toutefois, il existe bien quelques différences entre ces deux statuts.

Les militaires sous contrats sont recrutés pour un poste précis propre aux études qu’ils ont effectuées. En ce qui me concerne, ce fut  pour mes compétences en droit international et en droit spatial.

Pour les militaires qui ont intégré l’armée sur concours, la situation est différente. Ils ne sont pas recrutés pour un poste en particulier , et peuvent être affectés sur différentes fonctions de leur champ de compétence. Par exemple pour les commissaires des armées, corps auquel je suis rattachée, il existe plusieurs dominantes telles que le droit, les ressources humaines, la finance, l’audit, la logistique, les achats…

Par ailleurs, les militaires sous contrat ne font pas nécessairement toute leur carrière dans l’armée. A l’issue de leur premier contrat, ils peuvent choisir de poursuivre leur carrière militaire en renouvelant leur contrat ou d’aller travailler dans le civil/privé. Ils peuvent également se faire « activer » c’est-à-dire basculer de carrière.

Qu’aimez-vous dans votre métier ?

J’aime exercer dans un domaine qui a des implications aussi bien nationales qu’à l’international. L’intérêt du droit international est de dépasser les différences propres à chaque Etat pour établir des règles communes qui s’appliquent à plusieurs pays. C’est notamment le cas du droit international humanitaire, ou droit des conflits armés, qui s’applique uniformément à tous les Etats signataires de convention de Genève et c’est ce qui rend cette matière passionnante.

J’apprécie aussi énormément  de travailler sur le droit spatial, qui est également un droit international. J’ai conscience d’avoir beaucoup de chance de travailler dans ce domaine, car il existe peu d’opportunités qui permettent d’exercer comme juriste en droit de l’espace.

Au-delà de l’intérêt que j’ai pour ces matières , j’apprécie travailler sur des sujets qui sont susceptibles d’avoir un impact dans nos sociétés. Or, tout ce qui touche au droit international et à l’espace concerne l’ensemble de l’humanité puisque l’espace est reconnu comme un bien commun et un milieu aujourd’hui indispensable à nos sociétés. En effet, nos téléphones, ordinateurs, ou automobiles fonctionnement grâce à des satellites.

Il s’agit également d’un domaine stratégique. Sur le plan militaire, les capacités spatiales sont un soutien quotidien à nos opérations terrestres, aériennes et maritimes via par exemple les télécommunications, l’observation de la Terre ou le GPS.

Pourriez-vous vous nous expliquer vos missions et votre travail au quotidien ?

En tant que juriste au commandement de l’espace, mon travail au quotidien s’axe sur l’application du droit international et du droit de l’espace aux activités militaires mais aussi plus largement de toutes les questions juridiques plus classiques – nationales ou internationales -, de coopérations internationales, etc.  

Nous pouvons ainsi passer d’un sujet de droit national relatif à la loi sur les opérations spatiales française à un sujet de droit opérationnel propre aux capacités spatiales militaires mais également travailler sur des dossiers types participation à la rédaction de résolutions des Nations-Unies avec d’autres Etats pour encadrer des comportements que nous jugerions irresponsables, conseiller juridiquement le commandement du commandement de l’espace, participer à des exercices nationaux ou en coalition à l’international.

Quelle est la place du droit dans l’armée et dans vos fonctions ?

Les activités militaires sont très règlementées, au même titre que n’importe quelle autre activité.  Cependant, certains aspects juridiques sont nécessairement spécifiques à ces activités. Certaines actions militaires peuvent avoir des conséquences juridiques. Il est donc important que les militaires se conforment également au droit, comme tous citoyens, malgré certaines spécificités.  Autrement dit, pour les questions opérationnelles, le droit est une condition sine qua non avant toute action militaire et chaque action, armée ou non, s’inscrit dans un processus spécifique conformément au droit international. Chaque action doit ainsi être légitime et justifiée.

Ce métier correspond-il à des valeurs qui vous sont chères ?

Tout à fait, j’ai été sensibilisée et j’ai côtoyée des valeurs que portent l’armée compte tenu de mes parents. L’entraide, le sens de l’honneur, la droiture, l’engagement et l’adaptabilité sont autant de valeur qu’un militaire doit partager.

L’armée constitue bien souvent une sorte de famille d’adoption ou seconde famille. Beaucoup diront qu’il règne au sein des armées un esprit de camaraderie, propre à l’institution et que nous ne retrouvons pas dans le privé.

Pensez-vous que l’armée est accessible à tous ?

Oui, l’armée peut offrir une place à chacun en fonction de ses goûts et de ses compétences. Il y a une grande diversité de métiers dans l’armée.

Peut-on évoluer et valoriser ses compétences ?

Oui, le mérite est une valeur reconnue dans l’armée. Il est donc possible pour celles et ceux qui souhaitent que leurs compétences soient reconnues et valorisées d’intégrer l’armée.

Y a t-il une différence entre les femmes et les hommes dans l’armée ?

Non, concrètement l’égalité entre les femmes et les hommes est une valeur forte de l’armée. Ainsi, une femme peut exercer les mêmes fonctions et avoir la même évolution de carrière qu’un homme. A grade équivalent, salaire équivalent, femme comme homme. En tant que femme, j’ai également reçu la même formation militaire et les mêmes attributions qu’un homme du même corps d’armée et de la même spécialité.

Il ne faut donc pas avoir peur de devenir militaire sous prétexte que nous sommes des femmes. Le corps du commissariat des armées est par ailleurs parmi les plus féminisé de l’armée (environ 35% de femmes).

Auriez-vous des conseils pour celles et ceux qui voudraient suivre votre exemple ?

Je pense qu’il est important de se faire confiance et de prendre son temps. On ne peut pas forcément savoir ce que l’on veut faire lorsqu’on est jeune. Il faut être curieux, suivre parfois son intuition, et surtout se trouver des passions – pas nécessairement professionnelles. Si l’on se trompe sur son orientation ou si l’on doit changer de projet ce n’est pas grave, il ne faut pas voir cela comme une fin en soi. L’important est de s’épanouir dans un travail qui correspond à nos valeurs. Pour cela, l’armée offre une diversité de possibilités.

Comment peut-on vous contacter, ou contacter l’armée pour avoir plus d’informations sur les carrières accessibles aux jeunes ?

Vous pouvez vous rendre sur le site recrutement du corps des commissaires des armées (https://www.defense.gouv.fr/commissariat/recrutement) pour avoir des informations sur celui-ci. Il existe également de nombreux centre de recrutements (CIRFA) en France susceptibles de renseigner les personnes intéressées par l’Armée.

Auteur, Pierre Cornou

Inscrivez vous à la Newsletter!

Votre adresse email ne sera jamais transmises à des tiers et vous recevrez uniquement des informations en lien avec le contenu éditorial du site. Vous pouvez vous désinscrire à tout moment.

Un site participatif

Notre objectif est de réaliser un site participatif et collaboratif. Ainsi, dès la conception de ce site, nous avons sollicité des élèves de collèges et lycées pour cerner leurs attentes et y répondre. Nous avons également fait appel à des enseignants, et des professionnels du droit pour élaborer le contenu du site en collaboration avec les élèves. Chaque étape du développement de ce site fait l’objet d’une concertation. Notre souhait est que les élèves, et toute personne sensible au droit, puisse proposer des sujets et formuler des réponses en collaboration avec des juristes. Si vous voulez proposer un sujet, ou rejoindre notre équipe de bénévoles, n’hésitez pas à nous contacter pour en échanger.

Envoyez nous vos suggestions